Les vaches produisent des quantités importantes de méthane, un puissant gaz à effet de serre, par leur processus digestif. Chaque animal émet environ 200 livres par an, ce qui fait du bétail un contributeur notable au réchauffement climatique. Depuis des décennies, réduire les émissions de méthane du bétail sans compromettre la productivité constitue un défi majeur pour les scientifiques et les agriculteurs. Des recherches récentes offrent une percée : l’alimentation à base d’algues rouges réduit considérablement la production de méthane. Cependant, les mécanismes microbiens sous-jacents n’étaient pas entièrement compris.
Une étude collaborative de l’UC Davis, de l’UC Berkeley et de l’Innovative Genomics Institute (IGI) met désormais en lumière la manière dont les algues rouges modifient le microbiome intestinal, en identifiant les microbes clés qui contribuent à la réduction du méthane. Ces connaissances rapprochent les chercheurs de l’ingénierie des microbes intestinaux pour trouver des solutions durables à long terme, allant au-delà de la dépendance aux additifs à base d’algues.
Les algues transforment l’intestin de la vache
Des études antérieures ont démontré que les algues rouges (genre Asparagopsis ) bloquent une enzyme cruciale chez les microbes producteurs de méthane. La nouvelle recherche révèle que les algues déclenchent des activations et des désactivations spécifiques de gènes chez ces microbes, indiquant leur rôle essentiel dans la réduction du méthane. Lorsque ces gènes s’activent et se désactivent, les niveaux d’hydrogène augmentent brièvement dans l’intestin de la vache.
Surtout, l’équipe a identifié une bactérie du rumen, Duodenibacillus, capable de consommer cet excès d’hydrogène. Ceci est important car des niveaux élevés d’hydrogène peuvent provoquer une acidose dans le rumen, nocive pour l’animal. Le Duodenibacillus convertit l’hydrogène en succinate, un composé que la vache peut utiliser pour produire des protéines.
“C’est important car trop d’hydrogène peut entraîner une acidose dans le rumen, ce qui peut nuire à l’animal”, a déclaré Matthias Hess, chef de projet et microbiologiste à l’UC Davis. “Au lieu de cela, cet organisme utilise l’hydrogène et le convertit en succinate, un composé que l’animal peut éventuellement utiliser pour fabriquer des protéines.”
Ingénierie des microbes réducteurs de méthane
Les résultats ouvrent la porte à la création de communautés microbiennes qui surpassent les producteurs de méthane. En comprenant le fonctionnement de Duodenibacillus, les scientifiques peuvent potentiellement manipuler le microbiome du rumen pour une plus grande efficacité.
“L’hydrogène est une source d’énergie clé dans le rumen, en particulier pour les microbes producteurs de méthane”, a déclaré Spencer Diamond, chercheur principal à l’IGI. “Cette étude nous aide à mieux comprendre comment d’autres microbes naturellement présents dans le rumen peuvent détourner cet hydrogène des méthanogènes vers des bactéries susceptibles de rendre les animaux plus efficaces.”
Résultats expérimentaux
Les chercheurs ont analysé le liquide ruminal de huit vaches : quatre suivant un régime alimentaire régulier et quatre supplémentées avec des algues pendant 14 jours. Les vaches nourries aux algues ont réduit leurs émissions de méthane de 60 %, augmenté leur production d’hydrogène de 367 % et amélioré leur efficacité alimentaire jusqu’à 74 %.
L’équipe a également reconstruit le génome de Duodenibacillus, une bactérie précédemment non isolée en laboratoire. Ce code génétique complet donne un aperçu de son rôle de consommation d’hydrogène, de sa dynamique de compétition avec d’autres microbes et de sa fonction plus large dans le rumen. Des efforts sont en cours pour isoler Duodenibacillus pour une étude plus approfondie.
Cette recherche démontre que la manipulation du microbiome intestinal est une voie viable pour réduire les émissions de méthane provenant du bétail. En concevant des communautés microbiennes qui consomment efficacement de l’hydrogène, les scientifiques peuvent créer des systèmes d’élevage plus durables et plus respectueux du climat
